jeudi 28 mars 2013

là où je vais

là où je vais
Fred Paronuzzi
Editions Thieery Magnier
"Il suffit parfois de 3300 secondes pour que tout bascule. Léa, llyes, Clément et Océane, élèves au même lycée, vont en faire l'expérience. Ils se connaissent à peine mais ce jour-là, le temps d'un cours, chacun verra sa vie transformée. Quatre voix d'adolescents à la croisée des chemins."

Putain qu'est-ce qu'il écrit bien ! Oui, je sais c'est vulgaire de commencer une chronique comme ça mais c'est ce qui me vient, là, à l'instant où je viens de fermer le livre. J'ai les joues brûlantes, mal à la tête, non ce n'est pas la grippe, c'est dû à l'intensité avec laquelle je suis rentrée dans le récit. 
4 voix, 4 adolescents. Chacun sa merde, chacun son bonheur, chacun sa vie. Ils se croisent mais ne se parleront pas, ils ont d'autres personnes en tête et d'autres problèmes à régler. 
Je n'ai pas envie de vous dire ce à quoi chaque personnage est confronté, je préfère vous laisser le découvrir; moi-même, je n'avais lu que le résumé et je ne m'étais fiée qu'à l'auteur pour me lancer à la découverte de ce roman. 
Encore une fois, j'ai été transportée par son style. Des sujets actuels, des personnages qui parlent vrai et des situations qui sonnent justes. 
Bravo et merci Fred Paronuzzi de toujours me donner autant de plaisir et d'émotions à la lecture de vos romans.
A découvrir à partir de 14 ans. 

"11h10 
sonnerie

Léa

Trop conne. Je me sens vraiment trop conne.
Pas le moindre signe, rien. Elle m'ignore. Je suis transparente. À tout prendre, je crois que j'aurais préféré son mépris. Une moue de dédain. De la moquerie, même. N'importe quoi plutôt que ça.
Qui a dit que l'on existe seulement à travers le regard de l'autre ?
La nuit dernière, après avoir envoyé ce message sur Facebook, un message dans lequel j'avais pesé chaque syllabe, j'ai mis des heures à m'endormir. Des heures pendant lesquelles j'ai élaboré je ne sais combien de scénarios possibles. Avec, chaque fois, d'infimes variations. Mais étrangement, pas celui-ci. Le scénario du vide. Je n'avais pas anticipé ce désert. Sans doute que j'y croyais, à notre histoire.
Trop conne, vraiment trop conne.
Quand je pense que ce matin, en montant les escaliers, mes jambes me portaient à peine tant mon coeur cognait violemment, à déchirer ma poitrine.
Et pour quoi, hein, pour quoi ?
Dans ma boîte crânienne, c'est le maelström, un grand bordel fait de frustration, de colère, de désir, d'envie et de douleur.
Et en même temps, c'est d'un banal : je l'aime à en crever - et elle s'en fout.

La prof est en retard, on poireaute dans le couloir. «J'en ai marre, moi, elle fait chier l'autre, j'me tire», annonce crânement une voix. Mais personne ne bouge. On l'a croisée, en route vers la salle des profs de sa drôle de démarche. Hachée, en déséquilibre avant, à deux doigts de sprinter. Sans un regard pour personne.
Et c'est pire en cours. Soit elle ironise, elle casse, soit elle aboie. Son surnom c'est «Pit-Bull». Une vraie pile électrique, aussi. Toujours en mouvement. On croirait voir un pantin désarticulé et braillard, au tableau. Ça fait une moyenne avec le prof de maths. Lui, c'est le genre deux de tension. Mal rasé, débraillé et plus mou qu'un chamallow."
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